dimanche 30 mars 2014

TIGRANE II LE GRAND - ROI D'ARMENIE - Mais ce n'est pas un conte ...


Au cours des 17ème et 18ème siècles de nombreux compositeurs italiens, autrichiens et allemands ont composé plus de 20 opéras dédiés au roi d'Arménie, Tigrane le Grand.
Né en l'an 140 av. J.C., Tigrane II dit le Grand a accédé au trône d'Arménie en 95, succédant à son père Tigrane Premier (115-95). Il était le petit-fils d'Artaches Ier (189-160), fondateur de la dynastie des Arsacides.
Durant un règne de quarante années Tigrane II a fondé la ville de Tigranakert-Tigranocerte (en arménien — bâti par Tigrane), devenue la capitale de son royaume avec une population de plus de trois cents mille habitants. Trois autres villes-forteresses portant le même nom ont également été édifiées dans les provinces de Gokhtan, d'Outik et d'Artsakh. Le nombre des villes portant ce même nom s'élève en tout à sept.

Tout en possédant au plus haut point les qualités de stratège militaire et d'homme politique, Tigrane II était aussi amateur d’art et fut dans son royaume le protecteur des arts, en particulier, du théâtre.
En l'an 69 av. J.C. il fit construire dans sa capitale Tigranocerte un amphithéâtre hellénistique, destiné aux représentations théâtrales, donnant ainsi le coup d'envoi au développement du théâtre en Arménie.
L'existence, au cours d'une certaine période de trois capitales – Artachat, au nord-est du pays,  Antioche au sud-ouest et Tigranocerte, au centre – atteste de la grandeur et de la puissance de l'Arménie à cette époque.
Tigrane le Grand avait épousé Cléopâtre, fille du roi du Pont Mithridate VI Eupator, son allié dans la lutte contre l'Empire Romain.
Les monnaies d'or, d'argent et de bronze à l'effigie de Tigrane le Grand et avec la mention "Roi des rois", frappées sous son règne il y a plus de deux mille ans, sont rares et recherchées par des collectionneurs et numismates.

Monnaie à l'effigie de Tigrane le Grand
I siècle av. J.C


















La dernière apparition de la comète de Halley a eu lieu de nos jours, la veille des évènements du Karabakh-Artsakh ( et ).
Le fait exceptionnel des apparitions dans le ciel d'Arménie de la comète de Halley coïncidant avec des événements d’une telle importance, comme le règne de Tigrane II — pour les Arméniens un symbole de puissance et de prospérité — et la guerre du Karabakh, est perçu dans la réalité arménienne comme un présage céleste.

L'Arménie actuelle a rendu l'hommage à son roi le plus célèbre de toute son histoire, en érigeant sa statue monumentale à l'entrée de la résidence du Président de la République arménienne à Erevan, et en instituant (par la loi de 12 juin 2002) l'Ordre de "Tigrane le Grand", décoration décernée pour services exceptionnels rendus à l'Etat.

                     Tigrane le Grand - Levon Tokmajyan

Compositeurs ayant écrit sur le thème de Tigrane le Grand (parmi la vingtaine d'opéras écrits sur ce thème) :

L'opéra d'Alessandro Scarlatti "Tigran, rè d'Armenia" a été mis en scène pour la première fois le 17 février 1715, au "Teatro San Bartolomeo" de Naples. Par la suite il a été joué un peu partout en Europe.

Un autre grand musicien italien,  Antonio Vivaldi, (1678-1741), s'est intéressé au thème "tigranien" et a composé un opéra donné le 5 mai 1791 dans la salle "Gänsemarkt" de Hambourg avec le titre allemand "Die über Hass und liebe siegende beständigkeit, oder Tigranes, König von Armenien".

Le grand réformateur de l'art lyrique, l'autrichien Christoph Willibald Gluck (1714-1787), ainsi que l'italien Niccolo Piccini (1728-1800), auteurs tous les deux, de plusieurs dizaines d'opéras, ont eux aussi été inspirés par le sujet du  roi Tigrane : Gluck a crée sa version en 1743, et Piccini en 1761.

Dans l'ordre chronologique des créations d'opéras ayant pour sujet le roi Tigrane, il convient de citer le premier d'entre eux, celui de Tomaso Giovanni Albinoni, (1671-1751). La première représentation de son opéra "Tigran, rè d'Armenia", écrit sur le livret de Giulio Cesare Corradi, a eu lieu durant les fêtes de Carnaval du 1697, au "Teatro di San Cassiano" de Venise.

Compositeur d'origine allemande, ayant vécut la plus grande partie de sa vie en Italie, Johann Adolf Hasse (1699-1783), est l'auteur de plus de 80 opéras, parmi lesquels figure aussi "Tigran, rè d'Armenia". Cet opéra a été créé le 4 novembre 1723 au "Teatro San Bartolomeo" de Naples.

Les partitions de ces opéras, vieilles de deux, trois cents ans, sont aujourd'hui dispersées, pour certaines, un peu partout dans les bibliothèques et les collections privées en Europe et dans le reste du monde, mais beaucoup d'autres sont signalées comme perdues. 

Sources :

mardi 7 janvier 2014

UNE LEGENDE AIMEE DES ARMENIENS ENTRE TOUTES : LA NATIVITE

CURIOSITE DENICHEE DANS LES "ARCHIVES PRIVEES"

par Sinan BEY
(Forum des N.A.M)

 Gentile da Fabriano, Adoration des mages


Allez, pour bien finir la fête de Noël (pour ceux qui la fêtent - il y en a même qui ne croient à rien mais qui la fêtent kamème!):
nous présentons ici une curiosité, dénichée dans les 'Archives privées' :

Attention, ça commence: armez-vous de patience!

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Noël arménien : Pourquoi le 6 Janvier ?

Les Arméniens, première nation ayant proclamé le christianisme comme religion d’Etat en 301, voire vers 280, continuent à fêter Noël le 6 janvier et non pas le 25 décembre. Pourquoi ? Nous aurions pu donner une réponse historique, ou citer une notoriété ecclésiastique de nos jours. Nous préférons laisser la parole à Sa Majesté Gagik II, Roi d’Arménie.
Il explique lui-même les raisons de son intervention. « Je suis le Roi, dit-il, et le fils des Rois d’Arménie. D’autre part, je suis parfaitement instruit dans les sciences de la Bible. Je connais à fond l’Ancien et le Nouveau Testament. Tous les Arméniens peuvent en témoigner, puisqu’ils me classent parmi les docteurs de leur Eglise ».
C’était en 1065, devant le synode de Sainte-Sophie et devant la cour impériale de Constantinople qui poursuivait l’unification, c’est-à-dire l’assimilation totale du peuple arménien avec la Byzance.
Quelques décennies plus tard, dans les années 1130/40, l’historien contemporain Mathéos Ourhayétzi ou Matthieu d’Edesse, avec un plaisir sans retenu reproduit ce document intégralement dans ses Annales (éditées à Jérusalem en 1869) dont nous citons ici les passages relatifs à Noël (pages 195-214).
Rappelons cependant que les Arméniens (non catholiques) fêtent la naissance et la révélation du Fils de Dieu (Epiphanie) le même jour, le 6 janvier, c’est pourquoi on souhaite à Noël : « Christos dzenav yév haytnétzav – Tzézi mézi médz Avédis ! » (Le Christ est né et s’est révélé parmi nous : quelle bonne nouvelle, pour vous et pour nous !).

Le Roi parle (début de la citation) :
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« Quant à la fête de la Nativité du Seigneur, voilà : l’évangéliste et l’apôtre Luc dit : ‘Jésus avait trente ans’. Par là, il démontre qu’Il était baptisé et avait commencé son enseignement le jour même où Il venait d’avoir ses trente ans précis. 
Habituellement, l’on compte cent quatre-vingts jours pour la période où Zacharie resta muet, qui remet l’Annonciation au 25 mars d’où l’on compte deux cent soixante-seize jours pour la grossesse de la Sainte Vierge selon la règle de naissance du premier-né au dixième mois, pour en résulter la Nativité le 25 décembre.

« Examinons d’abord le livre des Lévites, ensuite l’Evangile. Dans les Lévites c’est écrit : ‘La fête que vous me consacrerez doit être sanctifiée. Trois fois par an vous ferez la fête, et tout mâle doit se présenter devant moi, et vous présentez des offrandes au Seigneur’. Un peu plus loin : ‘Le premier jour du septième mois est sacré. Et le quinzième jour du même mois est la fête qu’on appelle des Tabernacles, il est également sacré, n’effectuez aucun travail ce jour-là. Et le septième jour est sacré, le chabat du repos, n’effectuez aucun travail ce jour-là’. 

« Zacharie est tombé muet au mois (hébreu) de Techrine, ce qui est le septième mois, le jour du Pardon quand le grand prêtre entrait au Sanctuaire des sanctuaires, et ceci, une fois par an, selon le témoignage de saint Paul. Or, il n’était pas opportun à Zacharie de s’approcher de sa femme ce jour-là, car il était le grand prêtre de cette année, et la fête des Tentes était imminente : tout le peuple d’Israël y était réuni pour célébrer pendant sept jours cette fête. Il n’était pas possible au grand prêtre d’abandonner son public et de rentrer chez lui.

« Qu’il habitait à l’extérieur de la ville et non pas dans Jérusalem, à cela il y a le témoignage de Luc : ‘Les gens attendaient Zacharie et s’étonnaient de son séjour prolongé dans le Temple. Mais quand les jours de son office furent accomplis, il rentra chez lui’ (dans sa maison). Et il ajoute : ‘Après ces jours-là, sa femme Elisabeth fut enceinte’.

« A toute personne qui sait penser, il paraît évident : tandis qu’il était ordonné au simple peuple de sanctifier non seulement les jours des Fêtes mais aussi le début du mois jusqu’au troisième jour, comment le grand prêtre lui-même pouvait-il abandonner son peuple au milieu des grandes fêtes, rentrer chez lui et s’approcher de sa femme ? L’évangéliste ajoute encore : ‘Marie se leva et partit vers les montagnes, vers la ville de Juda, et entra dans la maison de Zacharie’. C’était le jour même des fêtes.

« Conclusion : Zacharie est devenu muet le dix du mois Techrine, c’est-à-dire le vingt-cinq septembre ; et le vingt-deux du mois Techrine il y eut le rapport et la grossesse d’Elisabeth. 

« En comptant les six jours du mois, ça fait cent quatre-vingts jours , ce qui se fixe au seize du mois, qui correspond au six du mois d’avril des Romains, le jour où l’annonce fut faite à la sainte vierge Marie (Annonciation). Y compris la dizaine de jours supplémentaires nécessaires à la naissance des premiers-nés, ça fait deux cent quatre-vingt-six jours : le vingt-et-un septembre, ce qui correspond au six janvier des Romains. » 

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(Fin du Discours du Roi).

Le débat continue encore sur d’autres sujets, et le Roi d’Arménie défend brillamment les thèses arméniennes. Son renom se répand auprès des grands docteurs de l’Eglise arménienne dont Mathéos cite fièrement une grande liste. Cela n’empêche pas pour autant les ‘Roméens’ (Byzantins) de l’assassiner plus tard, traîtreusement et sauvagement – à la manière byzantine.
(Le discours du Roi est traduit de l’ancien arménien).

PS : L’Eglise primitive universelle fêtait la nativité et la révélation du Seigneur le même jour, le 6 janvier. Par la suite, précisément en 353 (après J.-C. bien évidemment), le pape, voulant remplacer une fête importante païenne qui se célébrait à Rome juste après le solstice d’hiver, a dédié cette journée à la Naissance du Seigneur, et pour le 6 janvier, on a gardé sa révélation, l’Epiphanie. Les autres Eglises d’Orient ont suivi l’exemple, un peu plus tard, probablement après que l’Eglise arménienne se soit séparée des autres Eglises sœurs (VIe siècle). C’est ainsi que les Arméniens n’ont pas suivi l’exemple général et sont restés les seuls à fêter Noël et Epiphanie le même jour, le 6 janvier. Actuellement, les orthodoxes fêtent Noël le 7 janvier : c’est pure coïncidence. C’est à cause du retard du calendrier julien encore en usage chez eux. 
NB : Qu’on fête la naissance du Seigneur le 25 décembre ou le 6 janvier, n’a aucune importance dogmatique. C’est un fait pratique, pragmatique, liturgique. D’ailleurs, on ne sait pas quand le Christ est né, ni le jour, ni l’année. Selon toute probabilité, Jésus de Nazareth est venu au monde entre le 9 et le 5 avant Jésus-Christ. – 
Le Discours historique du Roi d’Arménie est présenté ici comme une curiosité.

(Copyright Simon Babikian).